Il me semble avoir vu ce roman dans la liste de recommandations d’une « célébrité littéraire », sans bien me souvenir qui et quand. Il n’empêche que j’avais ajouté le titre à ma liste « pense-bête », dans l’attente d’une occasion de me le procurer. C’est maintenant chose faite, et sans regrets !

Il y aurait tant de choses à dire sur un pavé si monumental, Prix Pulitzer 2014.

Le style ? Il évolue selon le regard du narrateur. La première partie, où, à 13 ans, Theo doit faire le deuil de sa mère suite à un accident traumatisant, est écrite avec une subtilité et un réalisme qui touchent au sublime ; le milieu, où j’ai voulu mettre des baffes à Theo et lui hurler à quel point je trouvais ses choix mauvais, traduisait à merveille les affres d’une adolescence sans repères ; le dernier quart, qui montre un jeune adulte dépassé par la tournure qu’a pris sa vie, est tout autant empreint de vérité. On croirait y trouver des imperfections ou des longueurs, et pourtant, en y réfléchissant, cela sonne on ne peut plus juste.

L’intrigue ? Elle nous conduit de New York et Amsterdam en passant par Vegas et re-New York, alternant entre Pippa, Boris, Hobie, les Barbour et la solitude de la drogue. Au fil des pages, il semblerait parfois y avoir des incohérences, des détails inutiles, des passages survolés, des oublis, … Mais arrivé au bout, tout fait sens et confère au roman une incroyable densité. On sent que rien n’y a été laissé au hasard, que chaque phrase, chaque mot est une pièce indispensable d’un gigantesque puzzle (enlevez ne serait-ce qu’1cm² d’arrière-plan à La Joconde, elle en perdrait l’équilibre qui lui confère sa force et sa beauté)

La question de fond qui baigne l’ensemble du roman ? Je l’interprèterais ainsi : à quoi l’individu peut-il se raccrocher pour ne pas sombrer face à l’insignifiance de son existence ? Les points d’ancrage que l’on choisit, consciemment ou non, pour définir notre identité et lui accorder un semblant d’importance, ne sont souvent que des chimères, des constructions purement imaginaires (l’amour, l’extase face à l’art, les paradis artificiels ouverts par les drogues ou le risque, notre rapport à la mort et au deuil…). Et pourtant, si fictifs soient-ils, ces repères nous rendent uniques ; ils sont la base de nos émotions les plus fortes, celles-là même qui rendent la vie digne d’être vécue.
J’ai aimé. C’est dense et profond, vrai sans pour autant avancer de certitudes.

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